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« Pause ton sac », un dispositif pour favoriser des relations de qualité au collège

jeudi 15 juillet 2021, par Stéphane GOUDET

Très sensible à l’impact d’un relationnel de qualité, Charlotte Serisier, enseignante de français en collège, développe en équipe des outils pour améliorer les relations avec les élèves et mettre en place une écoute empathique et bienveillante au sein de l’établissement. Voici la retranscription de l’entretien qui est disponible également grâce à Canopé.

« Pause ton sac », un dispositif pour favoriser des relations de qualité au collège


ENTRETIEN AVEC CHARLOTTE SERISIER, ENSEIGNANTE DE FRANÇAIS
EN COLLÈGE, JANVIER 2021.
« Les enjeux de santé », « La responsabilité juridique », « L’attention à la vulnérabilité », trois séries de podcasts disponibles en ligne dans le dossier « La prévention des risques, comprendre et éduquer », produits par Réseau Canopé, en partenariat avec GMF. Dans cet épisode de la série

« L’attention à la vulnérabilité », Charlotte Serisier, enseignante de français en collège formée à la communication non violente, distille auprès de ses collègues volontaires des outils pour améliorer les relations avec les élèves.

J’ai été nommée, en premier poste, dans une ZEP de région parisienne. J’ai été lancée dans le métier, comme la plupart des stagiaires, directement dans des classes pas simples.Quand il y avait des problèmes de conflit à l’intérieur de la classe ou avec un élève qui ne voulait pas du tout se mettre au travail et qui dérangeait le cours, en général, je réglais ça en fixant un petit rendez-vous en dehors du cours, après, en disant : « Là, ça ne va pas être possible, mais on va se parler après. », si c’était possible.Puis s’il fallait mettre l’élève à la porte parce que c’était impossible, je le mettais trois minutes dans le couloir à vue et il revenait quand il était prêt à revenir, en respectant les choses. Je bricolais et je trouvais mes façons, comme tout le monde dans le métier, mais toujours en privilégiant la relation, ce qui fait qu’après, j’ai pu rencontrer des élèves en dehors du cours. Je les emmenais, on me prêtait une salle pour pouvoir écouter ce qu’il se passait, et je leur disais : « J’aimerais bien comprendre ce qu’il se passe parce que, pour moi, ce n’est pas possible que ça continue. ».Un jour, j’ai eu l’écho d’un collègue qui m’a dit : « C’est incroyable ! Quand les élèves te suivent, quand tu les reçois, ce ne sont pas les mêmes. On dirait qu’ils sont plus grands, qu’ils sont plus importants. »Ça, ça a été un écho de ce travail qui était important pour moi parce que, justement, je me suis dit : « Ils ont tellement besoin de considération, qu’en leur en offrant, ils retrouvent, eux-mêmes, une estime d’eux-mêmes. », et c’est par là que ça passe

C’est par là que sont passées les relations, et c’est par là que s’est améliorée l’ambiance de classe.Ensuite, avec le groupe entier, régulièrement, grâce à ma discipline, le français, j’organisais des temps de parole, des débats, à partir du programme ou à partir d’un sujet qui émergeait de difficultés de gestion de classe. Et tout ça a permis de construire, en lien avec eux... Tout était en lien avec eux et avec moi. Voilà. Et très souvent, je n’intervenais pas dans ces débats. Tout était géré par eux. Voilà. Je pense que c’est en construisant comme ça, à partir de liens qui se tissent dans le groupe ou en personne, que j’ai compris que ce serait ma voie, d’enseigner sur ce chemin-là.Parfois, je rencontre des élèves en difficulté ou en malaise personnel en classe, et, avec le temps, c’est frustrant de ne pas pouvoir aider beaucoup ou de ne faire qu’une orientation vers une infirmière, vers une assistante sociale ou vers un CPE. C’est déjà pas mal, mais ce n’était pas suffisant pour moi, pour permettre de dénouer les choses, de faciliter l’apprentissage et de lutter contre le décrochage ou contre des réactions violentes. J’en voyais même qui tapaient les poings dans les murs, qui s’auto-mutilaient. C’était très frustrant de ne pas pouvoir faire plus, et, avec le temps, je me suis formée à la communication non violente.Ça m’a permis de nettement mieux comprendre les relations humaines, et à quel point, parfois, tous, avec des très bonnes intentions, on crée, par des mots, des habitudes ou des conditionnements, la fermeture chez nos élèves ou chez nos collègues, entre nous, et c’est justement ce qui rend difficile, parfois, les relations, et ce qui fait que ça en rajoute, à chaque fois, dans la difficulté.Le but de notre métier, c’est tout le contraire, c’est d’essayer d’améliorer, donc de créer de l’ouverture. Les outils de la communication non violente sont vraiment les plus efficaces que j’ai rencontrés pour travailler cette qualité de relation. Donc j’ai sensibilisé des collègues qui étaient intéressés. Toujours volontaires. Des collègues volontaires ont accepté de se sensibiliser à la communication non violente pour apprendre à écouter de manière empathique et bienveillante.Le mot « bienveillance » est devenu une pratique et non pas un mot et une injonction qui arrive de l’extérieur, qu’on ne comprend pas et qui nous désespère, parfois, parce qu’on ne sait pas ce qu’on attend de nous.Ces collègues ont accepté d’écouter des élèves avec moi, dans un cadre très officiel puisqu’on a intégré un projet d’établissement, des espaces « pose ton sac », on a appelé ça comme ça. Les élèves peuvent ainsi demander un temps de parole. Ils ont la liste des adultes qui peuvent les écouter, ils peuvent choisir un adulte en particulier, ou bien on peut, nous, aller vers eux et leur proposer une écoute, et on avait un lieu, dans l’établissement, réservé aux « pose ton sac », avec de beaux fauteuils que notre principale avait acheté à Ikea, et c’était déjà quelque chose d’important, puisque ce n’était pas le cadre habituel, c’était vraiment réservé à l’écoute d’un élève, s’il le souhaitait.Voilà, ce n’était pas obligatoire non plus.Ça nous a permis d’accompagner des élèves d’une manière très efficace et dans la durée.Nous travaillons avec des adultes qui ne sont pas forcément des enseignants.Au fur et à mesure, il y avait la psychologue scolaire, l’infirmière, des enseignants, des AED, des éducateurs... Bref, c’était tout une équipe.

LA PRÉVENTION DES RISQUES : COMPRENDRE ET ÉDUQUER | SÉRIE | L’ATTENTION À LA VULNÉRABILITÉ2

Ecouter cet entretien en podcast ici